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Mardi 26 septembre

Commentaire de l’évangile du jour: « Ma mère et mes frères sont ceux qui écoutent la parole de Dieu, et qui la mettent en pratique » (Lc 8, 19-21)

Ce passage de l’Écriture est une parole « dure » de Jésus ou perçue comme telle car elle est notamment adressée à Marie, sa mère. Cet épisode survient pendant le ministère de Jésus en Galilée et est rapporté par les trois évangélistes. Luc est celui dont la sobriété et la délicatesse des mots rendent les paroles de Jésus moins brutales.

Jésus est entouré d’une grande foule, également sont présents les « Douze et les femmes qui avaient été guéries d’esprits mauvais », nous dit Luc juste avant (Lc 8, 1-3). Jésus les enseigne en paraboles qu’il explique ensuite à ses disciples. Déjà les disciples de Jésus forment un groupe distinct de ses adversaires, scribes et pharisiens, qui cherchent à lui nuire (Lc 6,11). La renommée de Jésus nous dit Luc se répand dans toute la Judée et la région. La foule est omniprésente et oppressante nous relate Marc 3,15 à tel point que Jésus prévoit une barque pour se retirer et ne pas être écrasé puis au v 20 les disciples disent ne pas pouvoir manger à cause de la foule « Jésus vient à la maison (Nazareth) et de nouveau la foule se rassemble, à tel point qu’ils ne pouvaient même pas prendre leur repas ». Les adversaires, quant à eux, viennent de Jérusalem inquiétés par Jésus et toute cette affluence autour de lui. Ils n’hésitent pas à le qualifier de « possédé » (Mc 3,22). A cette nouvelle, nous dit Marc, les gens de sa parenté viennent aussi le retrouver pour « s’emparer de lui. Car ils disaient : « il a perdu la tête » (Mc 3,21).

La parenté de Jésus est, dans l’épisode qui nous occupe, représentée par Marie, mère de Jésus et les « frères » de Jésus. N’entrons pas dans la polémique de savoir si Jésus avait des frères au sens strict du terme. Notons seulement que les langues sémitiques comme l’hébreu ou l’araméen ont une difficulté sémantique à exprimer les degrés de parenté. Et par exemple dans l’AT, Abraham appelle frère Loth, qui est son neveu Gn 13,8. De plus, si les évangiles mentionnent effectivement à plusieurs reprises les « frères » de Jésus notamment en Mt 13,55-56 « N’est-ce pas le fils du charpentier ? Sa mère ne s’appelle-t-elle pas Marie et ses frères, Jacques, Joseph, Simon et Jude ? Et ses sœurs ne sont-elles pas chez nous », de ces frères de Jésus nous connaissons la mère de deux d’entre eux, une certaine Marie, mère de Jacques et de José (forme galiléenne de Joseph). C’est elle qui avec Marie-Madeleine assiste à l’ensevelissement de Jésus (Jn 19,25). Ce ne sont donc probablement pas des « frères » au sens où nous l’entendons d’une fratrie dont Jésus serait finalement l’ainé mais plutôt les membres de sa parenté.

Ensuite rappelons que ses « frères » donc sa parenté ne croient pas en Jésus et c’est Jean qui en parle clairement (Jn 7,5). Ils le provoquent sans ménagement un peu comme les pharisiens Jn 7,3-4. Nous pouvons alors supposer que dans ce passage, les « frères » de Jésus veulent le rejoindre non pour être enseignés mais pour le faire taire, le dissimuler pour un temps aux yeux de la foule et favoriser le retour au calme dans le pays et l’apaisement des pharisiens. Marie les accompagne avec tout ce qu’elle porte en son cœur et tout ce qu’elle a vécu avec son Dieu depuis l’annonciation de l’ange. Sa venue ne signifie donc pas nécessairement qu’elle partage leur ressenti encore moins leurs intentions et j’en doute fortement mais que peut-être sa présence peut atténuer les heurts. Oui, souvenons-nous des paroles de Marie dans le Magnificat « Mon âme exalte le Seigneur, exulte mon esprit en Dieu mon Sauveur ; Il s’est penché sur son humble servante, désormais tous les âges me diront bienheureuse ; le Puissant fit pour moi des merveilles, Saint est son Nom ! ». Marie silencieuse marche vers son fils avec les siens mais ne fait pas nombre avec eux.

Alors qu’ils approchent du lieu où Jésus se trouve, Jésus déclare que sa vraie famille est autour de lui. Ses frères ne parviendront pas à le rejoindre parce que ce n’est pas la foi qui les met en route ni le désir d’écouter sa parole, encore moins de lui donner du crédit. Ses frères sont loin et le resteront. La foule de leurs pensées, la foule de leurs préjugés, la foule de leurs croyances, la foule de leurs connaissances, la foule des influences subies fait obstacle à leur avancée vers Jésus. Jésus renverse l’ordre de supériorité et de puissance. Il n’y a pas de privilèges associés à la parenté, aux liens du sang dans le Royaume de Dieu. Le seul et unique chemin vers Dieu c’est l’écoute de sa Parole et la foi en lui car il incarne l’Amour absolu de Dieu pour sa création et pour chacun d’entre nous. Poursuivons la lecture du Magnificat de Marie « Son amour s’étend d’âge en âge sur ceux qui le craignent ; Déployant la force de son bras, il disperse les superbes ; Il renverse les puissants de leur trône, Il élève les humbles ; Il comble de bien les affamés, renvoie les riches les mains vides. ». Il est l’Amour parfait, l’Amour qui se donne jusqu’à mourir sur la croix pour sauver l’humanité de l’oubli de Dieu. Mais ça, ils ne le savent pas encore ! Marie non plus d’ailleurs nous rappelle Luc « Quant à Marie, elle retenait tous ces événement en en cherchant le sens » (Lc 2, 19)

Marie est la première qui a cru en la Parole de l’ange « Je suis la servante du Seigneur. Que tout se passe comme tu me l’as dit » (Lc 1,38), elle n’est pas directement concernée d’un certain point de vue par cette parole de Jésus. Il n’en demeure pas moins que l’incident fut pour elle une épreuve et cette parole, qu’on lui a sans doute rapportée, difficile à entendre. Une nouvelle invitation lui est cependant faite par son fils (on se souvient de l’épisode où Jésus enfant resta à Jérusalem à l’insu de ses parents, ou bien celui à Cana) à se dépouiller encore de l’amour humain et maternel pour pénétrer la sphère céleste toute intérieure, lieu de rencontre avec son fils et avec l’humanité entière. Et nouvel appel également nous est fait à percevoir notre vocation d’enfant de Dieu dans l’enfantement du Verbe de Vie dans la profondeur divine de notre être. Devenir nous-même, chacun, fils de Dieu dans un rapport non plus de force et de défense au réel et aux autres mais de confiance et de coopération. Appel à faire éclore le germe divin, les potentialités divines de notre être, que nous sommes de toute éternité selon la pensée unique de Dieu pour nous.

Confions-nous au Seigneur pour que notre cœur soit pris par cet unique désir d’union à Dieu en Jésus, par l’unique désir de vivre chaque instant, de la Vie même de Dieu en conscience et sans réserve. Chemin de libération, chemin de croissance spirituelle, chemin de vie avec l’Esprit, chemin d’épreuves aussi et chemin de grandes transformations intérieures, chemin d’ouverture et de relations de vie avec nos frères, chemin de reconnaissance. Les chrétiens ont en priorité à opérer dans ce monde de l’intériorité (comme Marie) et exprimer au dehors ce qui se vit au-dedans avec leur Dieu présent et invisible.

Myriam DUWIG

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