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Mardi 14 juin

Commentaire de l’évangile du jour : « Aimez vos ennemis » (Mt 5, 43-48)

Aïe, aïe, aïe. Aïe, aïe, aïe. Voici un évangile de la catégorie « décapant ». Ou « dérangeant ». Un évangile qui remet nos vies en question. Pas la Vie avec un V majuscule, celle des grandes orientations, des décisions capitales, des résolutions héroïques. Non, la vie avec un V minuscule, la vie de tous les jours, de chaque instant.

La première injonction de Jésus : « Aimez vos ennemis, et priez pour ceux qui vous persécutent » me paraît exigeante, certes, mais réalisable. Lorsque nous prions, tout naturellement, notre cœur se tourne vers ceux que nous aimons. Nous voulons leur bien, leurs préoccupations sont les nôtres : très spontanément nous les présentons au Seigneur. Prier pour nos ennemis est nettement moins évident. Cela demande un effort de notre part. Il faut déjà les identifier – ce n’est pas forcément simple -, surmonter un blocage psychologique bien compréhensible – ah oui, c’est vrai, le Seigneur me demande de prier pour eux -, accepter de consacrer une petite partie de notre temps de prière à ceux que nous apprécions… moins – n’est-ce pas du gâchis ? Ceci dit, dans une optique vertueuse et d’amélioration de sa vie spirituelle, c’est difficile, mais c’est faisable.

C’est après que, de mon point de vue, l’affaire se corse. La phrase qui m’interpelle vraiment, c’est celle-ci : « Et si vous ne saluez que vos frères, que faites-vous d’extraordinaire ? ».

Au cours des trajets que j’effectue quotidiennement, je suis souvent amenée à croiser, chaque jour ou presque, telle ou telle personne qui, elle aussi, effectue régulièrement le même parcours. Tout naturellement, au bout de dix, quinze croisements, nos regards se rencontrent, des sourires se répondent, et nous finissons par échanger un « Bonjour ! » joyeux. Parfois, les circonstances font que nous échangeons quelques mots, en particulier lorsque le hasard nous met en présence dans un autre contexte – dans un magasin, par exemple. J’avoue m’être toujours intérieurement félicitée de ces liens légers, imprévisibles, volatiles, mais bien réels.

Où est le problème, me direz-vous ? Ne suis-je pas en pleine réalisation de ce que me demande le Seigneur ? Ne devrais-je pas me féliciter de parvenir à mettre en pratique de façon innée, pour une fois, les recommandations de Jésus ? Eh bien voilà : l’honnêteté me pousse à reconnaître que, spontanément, j’ai tendance à créer des liens avec ceux qui me ressemblent, avec mes frères (mes sœurs, dans mon cas). Quant à ceux qui ne me ressemblent pas, ce n’est pas que je ne veuille pas les saluer, que j’éprouve de la répugnance à entrer en contact avec eux : non, c’est pire. Je ne les vois pas. Je ne les identifie pas. Je ne les reconnais pas.

Pour ma défense, c’est un travers très répandu : nous sommes attirés par nos semblables, par nos proches en âge, sexe, habillement, couleur de peau, classe sociale, appartenance religieuse… Je crains que cette excuse ne soit pas valable aux yeux de Jésus. Surmonter notre grégarisme, voilà ce que Jésus nous invite à combattre aujourd’hui. C’est un véritable, un authentique combat spirituel, un de ceux qui va nous occuper chaque jour, tout au long de notre vie. Mais quel enjeu ! Comme il justifie tous nos efforts pour aller au-devant de ceux qui ne sont pas nos frères ! Devenir parfait, comme notre Père céleste est parfait !

Marie Julie Leheup

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