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3ème Dimanche de Pâques

Homélie du 3ème dimanche de Pâques – Lc. 24, 13-35
A certains jours, nous marchons sur la route d’Emmaüs tels les disciples, aveuglés, tout tristes, le visage sombre.
Qui de nous, un jour ou l’autre, ne connaît pas le découragement, la déception effrayante qu’ont connu ces deux pèlerins ?
Qui de nous, un jour ou l’autre, n’a pas été déconcerté par le silence de Dieu?
Lequel d’entre nous, dans ce cas, s’il lui reste un brin de foi, n’a pas alors crié vers Dieu son doute, parfois même jusqu’au blasphème.
Chers amis, sur un tel chemin, on ne vient pas faire du tourisme biblique.
Si nous marchons sur le chemin d’Emmaüs, c’est d’abord parce que nous sommes perdus et désorientés.
Au point qu’à certains jours, nous souhaiterions des explications.
En effet, à quoi bon être chrétien si nous ne sommes pas mieux lotis que les autres?
Mais voilà, le Dieu des chrétiens n’est pas le «bouche-trou de nos insuffisances».
Si tel était le cas, nous le saurions.
En fait, tous, un jour ou l’autre, nous empruntons le chemin qui nous conduit de Jérusalem à Emmaüs.
C’est le chemin des retours tristes, des espoirs déçus, de l’absurdité d’une vie qui a perdu son sens.
Mais ce chemin de la peine, est aussi celui de la rencontre qui prend son sens à la fraction du pain.
Jésus nous rejoint de la même façon qu’il a agit avec les disciples.
C’est lui qui a l’initiative de la rencontre.Il nous rattrape sur notre route.
Même si nous lui tournons le dos.
Même si nous empruntons une route qui ne conduit plus à Dieu.
Sa présence est discrète.
Il ne s’impose pas.
Il se fait à peine reconnaître.
Il est surtout là où nous avons mal.
Il ne vient pas supprimer cette souffrance qui nous ronge mais il vient la vivre avec nous et en nous.
Il n’est pas là de passage, en coup de vent, comme l’ami pressé qui vient nous visiter à l’hôpital et qui a toujours une bonne raison, un rendez-vous urgent, pour ne rester qu’un instant.
Non! Au cœur de nos épreuves, sa présence est permanente.
Il se tait pour que nous lui parlions, afin que nous puissions crier notre peine et libérer nos amertumes.
Il laisse d’abord parler les autres, non par malice ou curiosité, mais pour leur permettre de «vider leur sac».
On dirait qu’il se glisse dans le sillage de nos sentiments et qu’il se cache au cœur même de nos fragilités.
Nos déceptions sont pour lui l’occasion de nous remettre en mémoire notre enthousiasme et nos espérances passées.
Comme autant de retours en arrière, … tel un temps pour nous souvenir des signes aperçus lorsque nous allions de l’avant.
Et puis, au cœur du manque dont nous souffrons, voici que le signe éclaire tout à coup l’ensemble du passé et provoque un nouveau départ.
La reconnaissance du Christ ressuscité passe par un geste de partage: celui de la parole et celui du pain.
La reconnaissance du Christ présent au milieu des siens passe par un geste de communication, c’est-à-dire par une intelligence de vivre.
Ainsi, les chrétiens ne sont pas des voyeurs, mais d’abord des gens qui accueillent et c’est en cela qu’ils sont déjà des croyants.
Ce qui suppose des cœurs et des mains qui s’ouvrent.
En fait, l’homme qui possède l’intelligence de la foi n’est pas forcément celui qui sait tout ou comprend tout.
Mais il est d’abord celui qui accepte de ne pas se fermer à ceux qui l’entourent.
Car c’est dans le partage que se construit l’Eglise.
C’est dans le dialogue que se transmet la joie.
La foi est indissociable de l’intelligence de la vie et des personnes qui nous entourent.
Le chemin du retour devient alors le chemin de la mission.
Nous comprenons que son alliance ne nous est pas donnée une fois pour toutes.
C’est une alliance nouvelle qui sans cesse se renouvelle.A une condition: ne pas vouloir saisir le Christ pour le retenir.
Nous découvrons alors que les sentiments sont faits pour aimer et la foi pour marcher.
C’est pour cela qu’il disparaît à leurs yeux, comme une communauté semble se dissoudre quand la messe est finie.
Mais au creux de nos déceptions, l’invité d’Emmaüs nous conviera encore et toujours :
-à vivre l’Alliance au cœur de l’amour
-à vivre du partage dans la vie de tous les jours
-à aimer Dieu en aimant la Vie.
Philippe Boissé – curé

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