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Mardi 21 juin

Commentaire de l’évangile du jour: « Tout ce que vous voudriez que les autres fassent pour vous, faites-le pour eux » (Mt 7, 6.12-14)

Partons de cette règle exprimée par Jésus : « tout ce que vous voudriez que les autres fassent pour vous, faites-le pour eux ». Elle sonne ou résonne tel un seuil en deçà duquel il n’y a pas d’amour possible ; un seuil en deçà duquel l’emploi des moyens de la puissance et de la domination sur autrui sous couvert d’amour prend des formes multiples et révoltantes. Nous pouvons aussi convenir à son sujet qu’il n’est pas nécessaire d’être chrétien pour la vivre et la mettre en pratique. La conscience est largement partagée sur ce qui favorise l’amour, la bienveillance, la justice, le respect mutuel, la solidarité.

Mais alors sur quoi Jésus insiste-t-il dans ces paroles ? Je pense que la particularité pour le chrétien est à chercher du côté de sa relation à Dieu et de notre vocation à l’amour dans la foi. Le chrétien donne ce qu’il reçoit à savoir l’amour de Dieu qui lui donne d’aimer à son tour. Il ne donne pas l’amour de lui-même ou à partir de lui-même. Il confesse qu’il n’est pas origine ou source de cet amour et encore moins celle de sa vie. Il cherche donc à vivre avec ceux qui l’entourent de cet Amour inconditionnel de Dieu et à en témoigner. Notre force est dans cette puissance d’accueil que nous sommes et reconnaissons comme fondement de notre vie ; nous ne sommes rien par nous-mêmes; nous accueillons le don de Dieu et nous donnons à nos frères et sœurs cet amour que Dieu nous donne. En somme, aimer c’est donner et accueillir. Il n’y a pas d’amour possible entre deux êtres en dehors de cet échange avec cette réciprocité d’accueil et de don, qui est un échange profond des âmes.

Cette approche de l’amour nous fait entendre autrement les paroles qui précèdent et qui suivent. Si l’amour est don et accueil, il faut logiquement qu’il y ait plusieurs personnes. On ne se donne pas à soi-même mais à un autre qui nous accueille. On ne s’accueille pas soi-même mais on accueille un autre. Puis-je donc donner sans être accueilli ? Jésus nous met en garde sur les possibles conséquences. Dans les situations où l’accueil n’existe pas, il ne peut pas y avoir d’amour – l’échange est finalement impossible : « Ne donnez pas aux chiens ce qui est sacré, ne jetez pas vos perles aux pourceaux, de peur qu’ils ne les piétinent, puis se retournent pour vous déchirez ». Comprenez, l’enjeu est de taille, l’amour est sacré et concerne le salut de nos âmes appelées à être transformées par cet amour, à vivre de cet amour, ne faire qu’un avec cet amour et être rendues capables d’aimer comme Dieu aime. N’est-ce pas également ce que Jésus signifiait à ses disciples lorsqu’ils les envoyaient deux par deux dans les maisons et leur recommandait instamment de partir des lieux où ils n’étaient pas accueillis au nom de Jésus-Christ. La Parole est sacrée, la liberté l’est aussi et vous ne pouvez rien forcer, rien contraindre. Il faut partir et attendre le moment favorable.

Et la mise en garde vaut aussi vis-à-vis-de nous-mêmes à l’égard de Dieu. L’amour impose d’être vigilant à se tenir dans cette posture d’accueil de l’Amour de Dieu, toujours premier, au risque de se perdre dans les méandres de nos intérêts propres et besoins divers souvent bien camouflés et qui toujours s’agitent et viennent polluer nos relations aussi désintéressées soient-elles. « Ce chemin est large et ils sont nombreux ceux qui s’y engagent », nous dit Jésus, c’est celui de la nature humaine livrée à elle-même et à ses propres ressources. Or l’amour humain ne réalise que partiellement ce mouvement profond de l’amour qu’est de devenir un avec l’être aimé. Notre joie d’aimer est sans commune mesure mais on réalise chaque jour sa difficulté et la souffrance associée. Car avouons qu’en cette vie mortelle, nous ne pouvons aimer quelqu’un sans nous aimer davantage, posséder quelque chose sans accentuer l’attachement que nous nous portons. Et Jésus de nous signifier l’étroitesse de la porte – la foi- et du chemin qu’il nous révèle en sa Personne mais qu’il faut chercher sans cesse : « elle est étroite, la porte, il est resserré le chemin qui conduit à la vie ; et ils sont peu nombreux ceux qui le trouvent ». Jésus lui-même nous le dit « Je suis le chemin et la Vérité et la Vie » (Jn 14,6), « Quiconque vit et croit en moi ne mourra jamais »  (Jn 11,26). Et ce chemin ne s’offre pas à nous sans efforts. Notre désir d’union au Dieu d’Amour, au Dieu révélé en Jésus-Christ est tout à la fois un arrachement constant à soi, un appel au dépouillement de soi et un mouvement intérieur de libération et d’unification d’une grande fécondité pour les âmes. La vie des saints en témoigne ainsi que leur importance pour notre vie spirituelle : être soi-même tout amour, uni au Christ, voilà ce à quoi l’être aspire au plus profond.

Demandons à Dieu et supplions-le d’augmenter en nous l’amour et de toujours nous mettre en condition d’accueillir l’Esprit Saint, guide de nos âmes pour apprendre à aimer infiniment sans aucune attention à soi, regard sur soi, repliement sur soi. Accueillir et donner : « Bienheureux les pauvres », bienheureux ceux qui sont et qui aiment.

Myriam DUWIG

 

 

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