Insaisissable

Ce mot qui ressemble au titre d’un film (c’en est un d’ailleurs), reflète pourtant à mon sens le mystère que nous allons célébrer au cours de cette semaine sainte : Jésus est insaisissable, nul n’arrive à le comprendre pleinement… mais chacun est invité cependant à le suivre.

Le dimanche des rameaux, nous commémorons son entrée à Jérusalem : « le jour de gloire est arrivé » doivent penser ses disciples et ses amis, qui le voient acclamé comme un roi. Pourtant, Jésus ne fait pas son entrée à la manière des empereurs, passant sous un arc de triomphe, mais sur un petit âne, une bête de somme. Voilà qui préfigure ce qui va suivre, lorsqu’il prendra sur lui tous nos péchés… Première note discordante dans l’euphorie du moment.

Puis, jeudi, nous nous souviendrons de ce repas durant lequel Jésus lave les pieds de ses disciples. Leçon magistrale de management : le chef se met au pieds de ses disciples ; il n’est pas au-dessus des autres, mais à leur service. Au point qu’il se donnera totalement pour ceux qu’il aime, à travers son corps et son sang offerts pour la multitude. Un geste qui peut sembler fou ! Un geste tellement fort qu’il reste marqué à jamais dans nos mémoires et nos pratiques.

Le vendredi, lui l’innocent, ne rechigne pas : abandonné de tous ou presque, il porte sa croix. Il continue d’avancer, avec courage, et s’il se laisse faire, il accompagne son destin. Celui qui devait tout changer, acclamé quelques jours plus tôt comme le sauveur, le voilà déshonoré, destitué de son rang. Et lui, le Vivant par excellence, le voilà qui agonise sur la Croix. Triste fin pour celui qui était écouté, suivi, qui avait guéri, sauvé, relevé tant de personnes. C’est à n’y rien comprendre.

Et au matin de Pâques, même mort, alors qu’on pense savoir où il est, alors que plus rien ne devrait changer, que tout devrait être figé, le voilà qui a disparu, avant d’apparaître aux femmes venues l’embaumer. Celles et ceux qui pensaient le connaître se rendent compte qu’ils n’ont pas compris, que celui dont le message et la vie les avait marqués est différent de ce qu’ils imaginaient, de ce qu’ils avaient décidé pour lui. Il est insaisissable, au point de demander à Marie Madeleine « ne me retiens pas ». Au point d’entrer dans la pièce où les apôtres se tiennent alors même que les portes sont fermées.

Alors oui, Jésus est insaisissable ! Ce qui ne l’empêche pas de se rendre présent à nos côtés quand il vient nous soutenir, nous encourager à avancer, à ne pas en rester là où nous sommes. Constamment, il nous provoque au déplacement intérieur. Puissent cette semaine sainte, et la fête de Pâques qui la clôture, nous aider à nous approcher de lui, sans chercher à le retenir, mais en acceptant de nous laisser toucher et transformer par lui.

Stéphane Jourdain

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